Promenade mondaine (pv Lorelei/ Irina au moins au début)

- Tu sembles vraiment avoir une vision de la Cour qui me plait. Beaucoup même! Tu me donnes envie de rester plus longtemps que prévu... As-tu des projets particuliers ? Il faut vraiment que tu imprimes ta marque ici, au fer rouge même! Cela donnerait une bonne leçon à toutes ces imitations, ces parodies et ces hypocrites! Les hommes comme les femmes, d'ailleurs!

Décidément, elle avait tout pour devenir une grande Tsarin. Il ne lui manquait plus qu'à dirriger la cour, une main de fer dans un gant de velour, et elle marquerait les esprits pendant les années à venir.

- Et puis, si tu as besoin, je ferais autant d'esclandres que tu veux!

Lorelei sourit:

-Merci, tu es gentille! Je crois que cela ne va pas être si difficile que cela de m'intégrer ici. Oh bien sûr, il y aura toujours des mauvaises langues, mais dans l'ensemble, je prends mes marques. Et puisque je suis la Tsarin, c'est moi qui fais la "mode"! Et je peux t'assurer que les précieuses et autres donzelles maniérées m'insupportent! Tous ses rubans, toutes ces dentelles et ces coiffes qui ne passent pas dans les portes! Des mouches partout sur le visage, qui diparaissent, reviennent au gré des fantaisies! Que de ridicule! Je suis pour la simplicité en toutes choses, elle est maîtresse de bon goût. En tous cas, c'est comme cela que je vois les choses. Je me refuse d'être un porte manteau ridicule si accablé de froufrous qu'il ne peut plus bouger même un doigt!

- Voilà qui est bien parlé!

Elle ne pouvait qu'admirer Lorelei. DAns la même situation, aurait-elle été assez forte pour prendre le dessus? Elle en doutait. Elle tenait tellement à sa liberté que parfois s'en était presque maladif.
Mais Irina imaginait tellement bien la Tsarin changer la cour, ou tout du moins ce qui devait l'être! Elle avait cette capacité qui lui permettait de pénétrer dans une pièce et de tout y faire changer par sa seule présence sans pour autant que quiconque sache pourquoi. Cependant, sa route était toujours pleine de dangers.

- Et as-tu eu l'occasion de rencontrer les fils du Tsar? T'entends-tu bien avec eux ou... elle regarda brièvement autour d'elle. j'imagine que la situation n'est pas facile pour eux non plus, et ce serait domage qu'ils t'en tiennent rigueur de quelque forme que ce soit.

Lorelei sourit: Artur n'avait pas semblé lui tenir rigueur de quoi que ce soit, quant au plus petit, elle ne l'avait pas même croisé dans les couloirs. C'était étrange d'ailleurs...

-Je n'ai rencontré qu'Artur, en fait. Et il m'a eu l'air d'un homme censé et gentil. Il n'avait pas l'air de me mépriser ou de me détester. Après je ne sais pas ce qu'il a pensé de moi, ce qui est sûr c'est que moi, je l'ai trouvé charmant. C'est aussi la raison pour laquelle je me sens si bien ici: je suis acceptée. Le connais-tu personnellement? Et as-tu déjà rencontré le plus jeune fils du Tsar?

A la mention d'Artur, Irina sentit son coeur s'envoler, ce qui était hautement inhabituel.

- Je n'ai pas encore eut le privilège de rencontrer le plus jeune... En revanche, j'ai eu le plaisir de rencontrer Artur! Et j'avoue que je ne le voie pas tenir quiconque rigueur de rien. C'est vraiment quelqu'un de charmant, ouvert d'esprit, tellement éloigné des hommes que l'on rencontre habituellement. Il a cette délicatesse dans le regard et quand il parle. Il ne cherche pas à mettre quiconque mal à l'aise, et s'interresse à tout...

Dire qu'elle en avait trop dit était un euphémisme... Mais elle savait que Lorelei ne lui tiendrait pas rigueur d'autant peu de contenance. Il fallait avouer qu'Artur avait quelque chose qui la perturbait, qui la troublait d'une façon toute neuve.

Lorelei sourit, mais dit avec la plus grande discrétion:

-Oui, c'est un homme charmant, et je vois bien que tu sais juger les gens à leur juste valeur.

Elle ne voulait pas insister sur le fait qu'elle avait compris l'inclinaison d'Irina pour Artur, sinon la conversation deviendrait gênée et elle ne le voulait surtout pas. Et puis Irina avait toutes les raisons du monde d'être amoureuse d'un homme si plein de qualités. Elle ne méritait pas moins et elle était sûre que lui aussi l'appréciait à sa juste valeur. Cela lui rappelait une fantaisie française, écrite par Mme de Scudérie, femme charmante au demeurant, dans Clélie, l'un de ses romans: La Carte du Tendre. Et Tendre sur Inclinaison était la ville la plus facile à atteindre. Venait ensuite Tendre sur Amitié sans doute puis Tendre sur Respect. Les trois villes semblaient réunies entre Irina et Artur, ce qui présageait quelque chose de vraiment fort: l'inclinaison, l'amitié, le respect, que demander de plus? Elle ajouta, pour lui donner néanmoins la possibilité d'en parler si elle en avait envie:

-Je crois qu'il est célibataire, si je ne m'abuse?

Irina entortillait entre ses doigts une mèche de cheveux qui s'était échapée. Sa tête semblait fonctionner à toute allure, presque aussi rapidement que son coeur.

- Oui, il m'a dit qu'il venait de rompre ses fiancialles... Parce qu'il avait réalisé qu'il ne l'aimait pas, enfin, pas comme un mari aime sa femme. Ce qui est une preuve à la fois de coeur et de lucidité et de courage. Ils se connaissaient depuis l'enfance, semblait-il, ou assez longtemps tout du moins. Qui en aurait eu le courage?

Elle soupira presque mélancoliquement, avant qu'un pli soucieux ne vienne naître entre ses sourcils.

- J'ai juste peur que cela le rende... plus dangereux d'une certaine façon. Les hommes mariés ou engagés envers une autre femme ont cet avantage que l'on sait à quoi s'en tenir. Et si eux ne gardent pas leur place, comme cela arrive souvent, la raison peut toujours me remettre les pieds sur terre. Les hommes libres... sont plus dangereux et plus fragiles à la fois.